C’est ainsi que dans notre dialecte wallon, les villageois appellent encore les veillées ou jadis vieux et jeunes se réunissaient durant les soirs d’hiver.
Quelques vielles femmes de chez nous en ont conservé l’habitude. Quand à la vesprée, ma voisine Norine, après avoir fermé hâtivement ses volets, jette sur ses épaules la cape usée qui ne rappelle en rien les modes d’aujourd’hui, tenez pour certain qu’elle va bientôt enfiler la venelle qui conduit à la demeure des ses amies Huguette et Mélie; elle part à “ l’chîje “, chez l’une ou chez l’autre. Maintenant cela se borne sans doute à raviver des souvenirs tout en parlant un peu des choses et des gens.
Mais autrefois, lorsque la vie au village était plus simple et n’en dépassait pas guère les limites, ces réunions étaient pour les villageois une de leurs distractions préférées et l’occasion de satisfaire un besoin de sociabilité.
A la lueur douteuse du crasset ou de l’unique quinquet à pétrole, selon l’époque, les hommes jouaient leurs parties de cartes en fumant et en sirotant leur verre de péquet, comme il convenait chaque fois qu’ils se trouvaient réunis. Les femmes, groupées autour de l’âtre ou flambaient les bûches des mannées, tricotaient la laine de leur mouton en commentant les faits quotidiens ou en chuchotant plus d’un petit secret que les maris et les fiancés n’avaient pas à connaître.
Mais certaines “chîjes” revêtait plus d’éclat. La tradition à la fabrication du poiré de l’année une solenité plaisante. Dans un énorme chaudron, sur un feu de bois, mijotait depuis le matin, le jus des fruits passés au pressoir. On l’additionnait de jus de betterave sucrant quelque peu le mélange que l’on tournait inlassablement au moyen d’un bâton. Comme le travail devait durer bien avant dans la soirée, il était d’usage d’inviter parents et amis pour la cérémonie finale consistant à verser dans la cuve, après la mise en pots du poiré, une quantité de bière qui prenait un je ne sais quoi d’enivrant. Sans doute, la cérémonie ne se terminait-elle pas toujours de manière aussi frugale.
Un de ces soirs-là, vous vous le rappelez vieille Norine, devait marquer dans votre vie. Pendant des heures, vous aussi, vous aviez surveillé la cuisson mais la fatigue vous était légère parce que vous étiez jeune et vous saviez que tous vos gestes gracieux étaient lorgnés par un beau gars de ving ans. Et, n’est ce pas au moment du départ de vos invités, que le beau jeune homme vous fit sur le seuil de la porte, l’aveu qui devait fixer votre avenir. Eh! Norine, c’est que le petit dieu malin est un hôte qui s’est toujours introduit subrepticement dans les meilleures sociétés.
D’autres soirs, lorsque le grand froid invitait la compagnie à se tasser autour de l’âtre, chacun y allait de sa petite histoire. Les histoires amusantes d’ou jaillissaient l’ironie, la gaîté et l’humour wallons alternaient avec les contes terrifiants des sorcières ou imagés des fées et des nutons; ou bien encore avec ceux des chevaliers et des nobles dames, dont rêvaient en rentrant fille et garcons.
Et c’est dans un silence religieux que l’aïeul avait l’honneur de commencer, tandis que le tic tac de la vieille horloge débitait les minutes qui passaient.
Il était une fois… Le pays mosan est un vieux pays romantique criblé de grottes mystérieuses ou se réfugiaient déjà les humanités primitives et peuplées depuis toujours d’êtres fantastiques par l’imagination populaire. Les crêtes des collines révèlent une longue histoire par des ruines de châteaux ou se sont déroulés des drames héroiques ou sauvages et les romans d’amour les plus touchants.
A “ l’chîje “, c’est là que nos pères, dans l’oubli des préoccupations du jour, aimaient à retrouver dans les légendes dorées les rêves ou se berçait leur âme pensive. En des fables ou des contes naïfs en apparence, ils contentaient leur besoin de poésie et de merveilleux, de philosophie parfois profonde et souvent satirique.
Jacques MOMBAERTS
A Profondeville
En parlant de la Meuse, des gens, des bêtes et des choses.
Editions HERALY
1947
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J’ai connu Jacques Mombaert lorsque j’étais âgé de 11 ou 12 ans en 1960.
Il a écrit un autre livre qui s’appelle « La république des Sarts » où il était question d’un veau-président ! C’était un monsieur à barbe blanche, l’air d’un vieux professeur distingué.Il habitait une grande maison à la sortie de Profondeville vers Dinant.
Avec le colonel Gueuffen, monsieur Cambron,un ancien industriel, et mon grand-père Lucien Hariga qui avait été échevin des travaux publics de Profondeville, il formait un groupe d’amis qui se réunissait pour jouer au Whist.
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moi aussi je me souviens de Jacques Mombaerts qui était très cultivé, très littéraire et surtout très distingué. Il portait une belle barbe blanche. Il était un très grand ami de mon grand-père. Avec d’autres, ils se réunissaient cordialement. Ils avaient toujours des histoires à raconter…de leur « temps »…
J’ai oublié les noms. Mais il y avait, aussi, un Monsieur SAUVANOT, qui lui habitait vers WEPION.
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